Raymonde & Jean-Pierre

J'étais enfant lorsque Raymonde, une amie de mes parents, de retour d'un vernissage, décida de s'improviser artiste. Elle venait d'admirer interloquée, les célèbres pots de fleurs de l'artiste Jean-Pierre Raynaud. Concluant qu'il suffisait, pour se prétendre artiste, de remplir de béton des pots de fleurs puis de les peindre en rouge, elle réalisa à l'identique plusieurs dizaines de pots qu'elle installa dans son jardin.
La carrière d'artiste de Raymonde ne connut pas d'autres rebondissements mais ce coup d'éclat remporta un vif succès et alimenta, dans son cercle d'amis, nombre de discussions amusées sur l'art et les artistes.

Bien plus tard je montais, en suivant à la lettre le mode d'emploi joint, une bibliothèque censée accueillir les livres de mes enfants.
Un verre à la main, un sachet de vis dans l'autre, je méditais sur mon rôle en tant qu'artiste dans cette épreuve et sur la nature de l'objet qui, doucement, naissait de mon travail.
Dans quelle mesure étais-je en train de me réapproprier ce meuble? Mon intervention avisée suffisait-elle à en faire une oeuvre d'art? Quel cépage avait donné au vin blanc qui m'assistait dans ma tâche ce goût ample et touffu?
Mon esprit vagabondait entre ces questions fondamentales lorsque, face au produit encore bancal de mes efforts, resurgirent les pots de fleurs de Raymonde et Jean-Pierre (je n'avais pas dix ans lors de notre première rencontre alors permettez, monsieur Raynaud, que je vous appelle par votre petit nom)

Le lendemain, de retour à l'atelier, je narrais l'anecdote à monsieur Bourgeaux qui s'empara de mes interrogations.
Nous decidâmes d'y répondre.

Monsieur Bertholon.

Groupe : EUX le collectif à 2

(première manoeuvre
images et installations)